La présidente de la Commission européenne prononce actuellement le traditionnel discours du président sur l’état de l’Union Européenne. Un discours ô combien politique, évidemment, mais également éminemment stratégique dans une période de grande bascule européenne.
Comme d’habitude, l’Union Européenne suscite bien des passions. Eurosceptiques, fédéralistes européens, souverainistes, partisans d’une simple Europe économique… les camps et divergences d’opinions sont aussi multiples qu’historiques. Cependant, il existe bel et bien un point sur lequel l’ensemble des observateurs s’accordent. Celui du contexte de grande bascule où évolue dorénavant l’Union Européenne. Car le contexte international est, on le sait, houleux, mouvant et incertain. Un environnement propice au durcissement des mœurs, des relations internationales et des rapports de force internationaux. Un environnement constituant, comme toute crise, aussi bien une source de menace qu’une opportunité de progression.
Si on a tendance à l’oublier de l’intérieur, où les critiques plus ou moins fondées contre l’Europe sont vives, l’Union Européenne suscite un intérêt, voire un attrait, auprès des autres puissances qui ne faiblit pas. A fortiori dans un contexte international où la souveraineté économique et technologique crée des rapports de dépendance envers les Etats-Unis et les chinois pour ces puissances précédemment citées. Or, une grande partie des Etats du globe s’avère soucieuse de trouver une “troisième voie” entre des Etats-Unis critiqué pour leur brutalité et une Chine suscitant défiance, avec un totalitarisme affiché, un espionnage massif et des rapports internationaux construits sur la force. A contrario, l’Union Européenne, bien qu’évidemment imparfaite, propose un modèle davantage basé sur la coopération et le pluralisme.
Ainsi, l’Union Européenne a un coup à jouer, quoi qu’en disait Jean-Claude Juncker et sa commission “de la dernière chance“. A condition de changer d’angle en abordant une direction tournée vers l’extérieur. “La Commission Juncker était très politique, la Commission Von Der Leyen sera très géopolitique“. Tels étaient les mots employés par Clément Beaune, actuellement secrétaire d’Etat en charge des affaires européennes, pour désigner ce changement d’orientation. Après des années de balbutiements politiques, il était effectivement nécessaire de renouer avec le concept traditionnel de l’Union Européenne, à savoir des réalités concrètes créant une solidarité de fait. Ainsi, la perspective d’une Union plus unie face au révisionnisme russe, à l’expansion chinoise et aux volontés hégémoniques américaines pouvait être le coup d’accélérateur tant désiré pour la construction européenne.
La réalité s’est évidemment avérée plus complexe. La crise sanitaire a mis en lumière certains replis nationaux mais également la constitution d’un emprunt commun, une grande première européenne. Aujourd’hui, Ursula Von Der Leyen souhaite encore aller de l’avant. Dans la lignée de la méthode fonctionnaliste, son discours s’articulera autour de trois éléments concrets : la transition écologique, la souveraineté numérique et la géopolitique. La perspective intellectuelle est séduisante… et la réalité du terrain plus glissante. Élue par une courte majorité de parlementaires, la présidente de la Commission ne partira pas sur un pied d’égalité face aux Etats. Son discours, axé sur l’avenir mais également sur le présent avec le bilan de sa première année de présidence, est attendu au tournant. La forme et le fond employés s’avéreront décisif pour défendre sa vision. Un discours en forme… de grande bascule.
[…] Ils avaient un déficit commercial avec la quasi totalité des États membres. En outre, à l’heure où la Commission Von der Leyen souhaite emprunter un tournant géopolitique, les britanniques désiraient rester dans une approche purement économique. Ainsi, au moment des […]